Par Daouda Aliyou
Au Nigeria, l’alphabétisation des adultes progresse de façon continue ces dernières années. Grâce notamment au soutien d’institutions internationales, de leaders religieux et aux premiers pas de l’Éducation universelle de base.
Le Centre d’éducation des adultes de Sanya, à Lagos au Nigeria, a fait peau neuve. Depuis 2007, les anciens bâtiments ont été réhabilités, les murs repeints et les vieux sièges remplacés. La centaine d’apprenants disposent désormais chacun d’un magnétophone. "Cet appareil me permet d’enregistrer les cours et de les réécouter, afin de mieux les mémoriser", explique, joyeux, Alamu Nassirou, mécanicien de 36 ans, inscrit dernièrement aux cours. Albert Agunbiade, enseignant et directeur du Centre, précise l’intérêt de ce matériel : "Les adultes avaient souvent des difficultés d’assimilation. Lorsqu’ils apprenaient une leçon, ils l’oubliaient quelques instants après."
Cette difficulté, ajoutée à l’absence de politique d’éducation réellement efficace, a eu des répercussions sur le taux d’alphabétisation des adultes de 15 ans et plus, qui, pendant des années, est resté relativement faible : 55,4 % entre 1985 et 1994, rappelle le dernier Rapport mondial sur le développement humain du PNUD. Selon la même source, ce taux est passé à 69,1 % entre 1995 et 2005. Une progression due, en partie, aux efforts de la Commission nationale d’alphabétisation de masse, d’éducation des adultes et d’éducation formelle (NMEC), qui, en collaboration avec le ministère de l’Éducation, a introduit progressivement dans la formation des adultes de nouveaux outils performants.
Selon Dayo Olagunju, secrétaire exécutif de la NMEC, les progrès sont quasiment les mêmes dans les 36 États de la fédération. Un succès à mettre aussi à l’actif de l’ex-président Olusegun Obasandjo, qui a fait de l’éducation un secteur clé des réformes socioéconomiques entreprises depuis l’instauration de la démocratie au Nigeria en 1999. La même année, a démarré l’Éducation universelle de base (UBE), dont le but est d’offrir une éducation gratuite à tous les élèves, mais qui vise aussi à accroître le taux d’alphabétisation des adultes. Les objectifs de l’Éducation pour tous adoptés à Dakar en 2000 ont par ailleurs incité les autorités nigérianes à élaborer et mettre en place de nouveaux programmes. Enfin, la politique nationale d’éducation au Nigeria, lancée en 2004, met, elle aussi, l’accent sur l’éducation des adultes et se focalise sur les groupes marginalisés (enfants des rues, filles, femmes et handicapés).
État, gouverneurs, chefs religieux : même combat
Pour le sociologue Godwin Edet, "la réduction du taux d’analphabétisme au Nigeria est en partie due à l’élection depuis 1999 de gouverneurs lettrés à la tête des 19 États du Nord, majoritairement musulmans. Par le passé, ces gouverneurs étaient des militaires nommés par l’État fédéral. Ils ne comprenaient que le langage de la force". Les nouveaux gouverneurs, dont la plupart ont étudié en Angleterre ou aux États-Unis, sensibilisent les populations sur l’importance de l’éducation, avec le soutien de l’État, des chefs religieux et d’institutions internationales comme l’Unesco,
La NMEC a profité de ce vent nouveau pour relancer ses actions. Depuis 2004, ses activités, jadis concentrées à Abuja, la capitale fédérale, ont été décentralisées et touchent 774 zones d’administration locale réparties dans les 36 États. La coordination et la supervision des cours d’alphabétisation sont placées sous la responsabilité du personnel local. "Chaque mois, nous devons organiser un minimum de 10 cours et des tests", confie un enseignant. À en croire ce dernier, les résultats seraient encourageants. Afin d'inciter davantage les apprenants, 2 millions de postes de radio ont par ailleurs été distribuées en 2006 dans les zones d’administration locale par les autorités en charge de l’éducation.
Galvanisée par ces succès, la Commission continue sur sa lancée en 2009. Élaboration de programmes d’études visant une réduction considérable du taux d’analphabétisme, octroi de matériel pédagogique favorisant l’usage des langues locales dans l’enseignement, etc. "Maintenant que nous tenons le bon bout, nous n’allons plus lâcher", déclare avec fierté Dayo Olagunju.
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